Israéliens et Palestiniens : une haine familiale ?

Texte en ligne de Michel Bavaud, Treyvaux

Je me souviens du rabbin de Lausanne qui, dans ses cours, nous signalait, il y a plus de soixante ans, les racines communes de l’hébreu et de l’arabe, deux langues sémitiques. Preuve incontestable de proximité historique.

Selon leurs croyances religieuses, juifs, chrétiens et musulmans se disent fils d’Abraham qu’ils vénèrent avec ferveur. Le premier fils d’Abraham est Ismaël, né de la servante Agar, mais souhaité et donc légitimé par Sarah, l’épouse stérile qui désespérait à mesure qu’avançait son âge. Isaac, fils tardif de Sarah est revendiqué habituellement comme ancêtre du peuple d’Israël, tandis qu’Ismaël est souvent considéré comme ancêtre des Arabes. Que mépris et jalousie aient brouillé les deux mères, peu importe. J’ai beau relire Genèse 22 et la sourate 37 :101-103 du Coran : je ne sais pas si le droit d’aînesse revendiqué par les musulmans est inférieur à la « légitimité relative » du cadet contradictoirement appelé « fils unique » dans la Bible.

A la frontière poreuse des mythes fondateurs de tous les peuples et de l’Histoire réelle, des récits anciens ressassés et enseignés permettent autant d’interprétations capables d’unir ou de séparer quand ils sont utilisés à des fins politiques. Seraient-ce encore Ismaël et Isaac qui hantent les esprits des ennemis d‘aujourd’hui et font perdurer les conflits haineux ? Mais en l’occurrence, raison et croyances prêchent leur fraternité.

Qu’il y ait au partage d’un héritage, des discordes de droits et de pouvoirs, des interprétations diverses de testaments, quoi de plus tristement banal. Cela arrive dans beaucoup de familles, mais après plus de six mille ans, selon le calcul approximatif des prophètes, il serait temps de se réconcilier. Le mélange de religion et de politique est à proscrire, mais la notion de terre promise, de peuple élu est aujourd’hui encore politiquement utilisée par les Israéliens, orthodoxes intégristes, croyants modérés et athées nationalistes confondus, pour grignoter sans cesse un peu plus les territoires-croupions des Palestiniens. Pourtant en l’occurrence, l’argument même de leur foi respective devrait les rapprocher au minimum comme deux demi-frères !

Faut-il qu’ils se résignent a vivre ensemble, moyennant quelques scènes de ménage ordinaires, ou faut-ils qu’ils fassent pays séparés en bons voisins coopératifs ? Peu importe, mais qu’ils arrêtent de s’entretuer. J’avais cru au sionisme en 1945 pour apaiser un peu la culpabilité ressentie après l’horreur du nazisme, mais ce fut une de mes illusions.

Chaque guerre utilise Dieu dans les deux camps pour diaboliser l’adversaire, ce qui obscurcit les esprits et fortifie la haine.

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